Cultures et sociétés mésolithiques en France

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  • Chapitre1
    Le Mésolithique en France, d’hier à aujourd’hui
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    Les cadres paléo-environnementaux
  • Données paléo-environnementales

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    L’habitat sous toutes ses formes
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2 Les cadres paléo-environnementaux - données paléo-environnementales

Charbons_et_noisettes

Restes carbonisés de charbons de bois et de coquilles de noisettes, niveaux mésolithiques, Cuzoul de Gramat.

 

Les plus vieilles industries mésolithiques apparaissent en France dans la seconde moitié du Xème millénaire cal BC : elles sont donc contemporaines des débuts du Postglaciaire qui, comme partout ailleurs dans les zones tempérées de l’hémisphère nord, se caractérise avant tout par l’augmentation tendancielle des températures et des précipitations. Cette modification climatique offre progressivement des conditions éminemment favorables au redéploiement du couvert forestier et des espèces qui le peuplent, ainsi qu’à la colonisation des espaces montagnards, jusque-là très hostiles. Mais ce qu’elle donne d’un côté, cette amélioration bulle...holocène le retire peut-être de l’autre : sous l’effet des transgressions atlantique et méditerranéenne, les lignes de côtes se perdent ou se transforment, des îles sont englouties et d’autres apparaissent, les territoires littoraux se morcellent, les basses terres continentales sont ennoyées, les rivières et les fleuves changent de régime et trouvent de nouveaux équilibres, les premiers deltas se forment. C’est donc à une modification profonde et tout azimut du milieu naturel que sont confrontées les populations mésolithiques et nul doute que l’originalité de la période ne trouve dans cette confrontation –et dans les adaptations qu’elle a suscitées- certains caractères essentiels de sa définition.

 

Entre 9700 et 8000 cal BC s’étale le Préboréal, déjà humide mais encore frais. L’amélioration climatique est cependant suffisante pour permettre le développement d’une forêt, encore clairsemée certes, où dominent bouleaux et genévriers. Le noisetier, et certaines variétés de chênes y font leur apparition. Vers 8000 commence le Boréal. Pendant plus d’un millénaire, l’augmentation des températures et des précipitations est constante. Le pin et le noisetier deviennent les essences dominantes, dans une forêt de plus en plus omniprésente. Vers 6900, au début de l’Atlantique, températures et humidité atteignent leur maximum : c’est l’Optimum climatique, durant lequel la grande forêt tempérée, dominée par la bulle...chênaie mixte, connaît sa plus grande phase d’extension. L’évènement climatique connu sous le nom de « 8200 cal BP event » interrompt quelques temps (en réalité, il se place entre 6300 et 6150 cal BC) cette longue séquence favorable : son impact direct, dont les conséquences réelles restent encore à apprécier en France, pourrait cependant avoir été plus importante chez certains préhistoriens que chez les préhistoriques ! Sans en exagérer les conséquences et en évitant de tomber dans le piège d’un déterminisme climatique qui revient parfois à la mode, on peut par contre facilement imaginer que cette dégradation des conditions climatiques, plus ou moins concomitante avec les mutations sociales et techniques qui marquent la seconde partie de la période, ait favorisé certains processus de recomposition, en réalité déjà à l’œuvre depuis quelques siècles : ainsi en est-il dans le sud-est de la France, où cet évènement 6.2, assez nettement postérieur à l’apparition des trapèzes, se marque par une aridité croissante qui semble avoir elle-même influé sur la localisation des implantations humaines.

 

Ce cadre général admet bien sûr des nuances : le redéploiement forestier ne s’est pas fait avec la même rapidité, ni selon les mêmes modalités, sur la façade atlantique ou près du littoral méditerranéen, au pied des Pyrénées ou en plein cœur du Massif central. Il reste néanmoins valable dans ses grandes lignes et montre clairement que les populations mésolithiques ont évolué dans un univers entièrement revégétalisé, au point probablement d’en oublier jusqu’au souvenir même des grands espaces paléolithiques. Cette dimension environnementale, trop souvent négligée dans ses conséquences, est pourtant manifestement l’une des clés de compréhension de la période et de son dynamisme. On peut penser en effet que ces transformations profondes du milieu ont conditionné une bonne partie des comportements collectifs et individuels, aussi bien dans le domaine des activités quotidiennes que dans celui, plus difficile à appréhender mais vraisemblablement nettement plus symptomatique, de l’univers symbolique et des mentalités.